Friday, August 25, 1989

Comme si tout pouvait être rattrapé (1989, Bruxelles)

Je la regarde s'asseoir.
Je sais qu'elle est venue pour moi, juste pour moi.
Comme si cet instant allait tout rattraper.

Elle s'assied en tailleur, je l'attendais pour une fois.
Gênée ou mal à l'aise, elle baisse les yeux.
Elle me demande de s'expliquer. Pourquoi pas ?
Comme si ces cinq minutes allaient tout rattraper.

Elle relève son regard et m'observe.
Je baisse les yeux, mal à l'aise, pourtant je ne suis pas fautive.
J'ai peur de trahir mon émotion. J'ai envie de lui dire...
toute la haine mûrie pendant toutes ces années.

Elle a envie de me dire peut-être combien elle regrette,
combien elle n'avait pas voulu le faire mais il le fallait.
Elle parle dans le vide de n'importe quoi. Elle m'étpnne.
Elle vit, elle a vécu pendant tout ce temps.
Elle s'arrête et me dit tout bas que j'ai changé,
qu'elle est contente de me voir.
Comme si toutes ces paroles allaient tout ratttraper...

Je souris, je la fixe pour qu'elle ne me regarde plus.
Je lui demande ce qu'elle a fait pendant tout ce temps-là.
Elle s'empresse de me dire que vu les circonstances,
c'était la seule solution à choisir.
Elle ne me répond pas à la question.
Je l'écoute parler maladroitement.
Elle est perdue. 'émotion l'a prise.
Je détourne les yeux vers la fenêtre.
Comme si cela pouvait tout soulager...
Elle me dit qu'elle est mariée.
Elle ne me dit pas si elle a des enfants.
Je n'ose pas le lui demander.

Elle me demande ce que je fais, si je suis heureuse.
Je luis réponds que c'est bien mieux sans elle.
Elle me regarde. Elle a le regard qui me fait pitié.
Comme si cela pouvait tout rattraper...

J'en suis gênée. Elle a gagné.
Elle éclate en sanglotys, cache son visage,
me demande pardon... j'ai gagné !
Comme si cela pouvait tout rattraper.

(c) 1989 mihee-nathalie lemoine